Réalité augmentée : l’avènement d’un « super collaborateur »

Comment répondre à l’importante pénurie de main d’œuvre dans les ateliers industriels ? La réalité augmentée peut pallier rapidement le problème des compétences. Elle soutient un objectif ambitieux, celui de rendre les opérateurs plus efficaces et de les valoriser en leur permettant de se consacrer à des missions à plus forte valeur ajoutée. Et s’ils participent à son adoption et sont associés à son déploiement, leur satisfaction n’en sera que plus grande. Ce sera un atout capital pour les évolutions futures des ateliers.

L’industrie devant l’urgence de la pénurie des compétences

Comment trouver des techniciens qualifiés ? C’est la question que se posent actuellement de nombreux dirigeants de l’industrie manufacturière, en France et en Europe, alors que les pénuries de main-d’œuvre et les déficits de compétences freinent leurs ambitions de reprise après la pandémie. Compte tenu de l’ampleur de ces problèmes, des réponses audacieuses et urgentes sont nécessaires. En effet, les entreprises manufacturières signalent qu’il est de plus en plus difficile d’embaucher. Quelque 79 % d’entre elles font état d’une pénurie de compétences, selon un rapport 2020 de DIGITALEUROPE, une association européenne du numérique regroupant entreprises et associations professionnelles. Selon ce rapport, les nouveaux diplômés n’ont pas les compétences opérationnelles. Les plus expérimentés ont été formés dans un monde manufacturier traditionnel et pré-numérique.

Par conséquent, les entreprises manufacturières sont sous pression pour attirer les talents et former dans l’urgence leurs équipes, actuelles ou futures, sur les compétences recherchées. La réalité augmentée (RA) peut constituer une réponse clé face à cette situation, à condition que l’opérateur occupe une place centrale dans sa mise en œuvre.

La réalité augmentée a démontré sa pertinence dans le monde industriel

L’adoption de la réalité augmentée, qui superpose des informations numériques sur un objet ou un environnement physique, favorise la collaboration à distance. Son usage a connu une forte augmentation au cours de l’année écoulée. Pendant la pandémie, elle a prouvé son utilité, notamment dans les environnements industriels. Lorsque les déplacements étaient fortement limités, la réalité augmentée a facilité les interactions entre des équipes dispersées aux quatre coins du monde, leur permettant de résoudre les problèmes à distance. En cela, la RA réduit les frontières entre les usines.

Aujourd’hui, les employeurs considèrent également la réalité augmentée comme un atout pour attirer de nouveaux talents et enrichir les compétences des collaborateurs en place, et une solution pour réduire le risque d’erreur humaine. La réalité augmentée participe clairement à faire baisser les coûts associés au recrutement et à la formation. Elle améliore l’intégralité de la chaîne humaine de l’entreprise.

Alors, comment tirer profit de la réalité augmentée pour satisfaire les attentes des opérateurs et offrir les meilleures chances de réussite à l’entreprise industrielle ? Celle-ci devrait commencer par identifier un problème, un point d’amélioration ou un défi qui pénalise les employés dans leurs tâches quotidiennes.

Prenons l’exemple d’une machine nouvellement installée utilisée pour l’assemblage d’un objet et sur laquelle les opérateurs rencontrent des difficultés. La réalité augmentée pourrait projeter une image tirée d’un fichier CAO, par exemple de l’objet à assembler. La notice d’assemblage, composée d’images, est ainsi projetée, étape par étape, à l’endroit précis de la machine réelle où cette opération doit avoir lieu. Cette technique de guidage pas à pas aide les opérateurs moins qualifiés dans l’exécution de leurs tâches.

Les ingénieurs de maintenance opérant sur le terrain pourraient également recourir à la réalité augmentée afin de présenter à leurs confrères du bureau d’étude la meilleure façon d’éliminer un défaut sur un produit.

La réalité augmentée au-delà de la pédagogie

La réalité augmentée peut donc résoudre un problème qui, autrement, aurait pu se révéler chronophage, consommateur d’énergie et miner la patience des opérateurs – la force vive de l’industrie manufacturière. Leur implication ne doit pas se limiter au signalement des points bloquants. D’après certaines expériences, les meilleurs résultats sont obtenus lorsque les employés continuent d’être consultés et impliqués tout au long de l’avancement d’un projet et que leurs besoins, préoccupations et suggestions sont pris en compte.

En pratique, ils devraient être associés :

–       à la définition des cas d’utilisation (potentiels) de la réalité augmentée. Les entreprises doivent être capables d’élaborer des cas d’usage visant l’amélioration de flux d’opérations (workflows) complets. La meilleure façon d’y parvenir est d’observer et de consulter les employés sur les différentes étapes d’une opération ou d’un ensemble de tâches qui pose(nt) problème. Laissez-les exprimer leur(s) point(s) de vue.

–       aux choix technologiques. Lorsque les entreprises se préparent à réaliser un investissement important dans la réalité augmentée, elles doivent se poser les bonnes questions dès le départ. De mauvais choix pourraient altérer la motivation des opérateurs. Découragés, ils pourraient revenir à leurs anciennes pratiques. Le matériel et les logiciels fonctionnent-ils de la manière dont les employés en ont besoin ? La technologie est-elle facile à utiliser ? Leur permettra-t-elle d’accéder aux informations aisément ? Les appareils d’affichage de réalité augmentée proposés leur permettent-ils de travailler les mains libres ?

–       au choix du contenu numérique. Son importance ne doit pas être sous-estimée car c’est à partir du contenu qu’on augmente la réalité. Dans le cas d’utilisation industrielle, les données peuvent contenir les informations techniques et les connaissances essentielles sur la façon dont les produits sont construits, configurés et fonctionnent. Les instructions de travail, quant à elles, devront être complétées par les connaissances « informelles » (mais si importantes) des travailleurs expérimentés car ils ont acquis les meilleures façons de réaliser différentes tâches. La voix des opérateurs pour signaler les données erronées ou les disfonctionnements récurrents est précieuse.

–       au retour d’information.Si de nombreuses équipes dirigeantes souhaitent que l’utilisation de la réalité augmentée améliore les indicateurs clés de performance (ICP) en matière de productivité, de débit ou de gaspillage, il est peu probable que cela se produise si les opérateurs n’en rendent pas compte. Parce que le travail en usine évolue en permanence, recueillir le commentaire des opérateurs et y donner suite est le meilleur moyen de s’assurer que les ICP soient atteints (ou non). La remontée des informations de terrain par les opérateurs doit occuper une place centrale dans la stratégie numérique.

La RA aide à résoudre de vrais problèmes pour de vraies personnes. Le recours à la RA pour faciliter et améliorer le travail des opérateurs fera une excellente publicité pour la marque employeur. Et si elle permet également de donner la parole aux opérateurs, leurs compétences et leur satisfaction en sortiront grandies. C’est aussi une bonne manière de les garder à bord. Les entreprises ne s’y sont pas trompées puisqu’elles envisagent la RA comme un moyen de cohésion et d’organisation, qui ne se substitue pas à son capital humain si précieux, mais au contraire, sert les objectifs de performance de ce dernier.

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